« Bah putain, c’est pas trop tôt ! »

Lâcha Enora avec subtilité quand la dernière tache fut vaincue. Mission éprouvante, avec toute ses fichues tâches de niveau 3 qui n’avaient visiblement pas envie de crever. La jeune fille avait fini par s’y faire mais c’était toujours un soulagement de voir que ce n’était pas aujourd’hui qu’on allait passer l’arme à gauche. L’irlandaise jeta un œil sur le reste de sa petite équipe, à savoir Loebhan, Eagle et Dreiden. Une belle bande de bras cassés qu’ils formaient tous les quatre. Les taches s’étaient montrées particulièrement ardues, et personne aujourd’hui ne s’en sortait complétement indemne. Eagle arborait un beau cocard sur l’œil, ‘Bhan avait reçu un coup de griffe sur la jambe, Dreiden au torse. Quant à Enora, elle avait une très jolie ouverture le long de son avant-bras. Une nouvelle cicatrice qui irait rejoindre la panoplie qu’elle avait déjà. Rien de bien méchant pour les quatre, mais un passage chez le docteur était de mise, comme après chaque missions d’ailleurs. Personne dans le groupe n’était du genre à rester en arrière et à se protéger. En fait ils étaient tous dans la catégorie des bourrins qui trouvaient vachement plus drôle de se jeter dans le feu de l’action. Au propre comme au figuré.

Mais aucun des protagonistes n’avaient spécialement l’air fatigués de leurs performances. Le retour au centre se fit dans la cacophonie, chacun prenant soin de décrire les moments clés de la bataille et leurs actions héroïques. Sauf Loebhan. Bien sûr. Ce dernier d’ailleurs était venu les rejoindre un peu plus tard, voyant que les trois autres se faisaient, lentement mais surement, encerclés par le nombre de taches. Mise à part les blessures, on aurait cru voir une bande de jeunes qui sortaient du cinéma après un bon film d’action bien kitch. Ils entendirent à peine John leur rappeler qu’ils devaient aller à l’infirmerie se rafistoler. Juste pour l’emmerder, ils répliquèrent avec un « Ouais, John » , alors que ce dernier râlait sur le fait que personne ne l’appelait « Régisseur ».

Enora n’aimait pas spécialement l’infirmerie. C’était chiant, et il n’y avait rien à faire si ce n’est attendre que Doc ait fini son affaire. Heureusement qu’ils y allaient régulièrement par lot de 3 ou 4, pour qu’ils puissent tous papoter en attendant la fin, sinon il y avait de quoi mourir d’ennui. Déjà que le centre c’était loin d’être disneyland et qu’il n’y avait pas grand-chose à faire pour passer le temps. Une fois sortie d’ici, ils iraient certainement dans la salle de musique avec les autres. Pour changer. Et Loebhan se barrerait surement sans rien dire.

Doc les accueilli avec son air blasé habituel. Ceci du mec contentieux qui te dit rien qu’avec les yeux que la santé c’est important. Il avait fait une brève auscultation de chacun avant de marmonner quelque chose de relativement incompréhensible derrière son masque. Mais tout le monde ici présent savait qu’il était en train de les engueuler parce qu’ils avaient encore trop joué avec le feu. Voyant que tout le monde plissait les yeux pour comprendre ce qu’il disait, le médecin répéta plus fort :

« Si vous voulez crever, dites-le tout de suite ! Comme ça j’arrêterais de vous rafistoler la gueule toutes les deux minutes ! »

« Ça va c’est bon… » Maugréa Enora en tentant vainement de s’asseoir de façon confortable sur un des lits, bientôt rejoint par Dreiden. « On nous rabâche qu’il faut détruire ces saloperies, et on le fait, c’est tout. Si tu veux, la prochaine fois en mission on attend tranquillement qu’elles viennent nous massacrer, ça te ferra du boulot en moins et nous ça nous évitera de nous fatiguer. »

Doc grogna un truc avant de chercher de quoi les soigner dans la salle d’à côté. Enora senti un truc froid sur son bras et vit que Loebhan était en train de passer sa langue sur sa blessure. Ce n’était certainement pas pour faciliter la tâche de Doc mais plutôt parce qu’il avait soudainement soif et qu’il ne supportait pas le gâchis. L’irlandaise avait fini par prendre l’habitude d’être considérée comme une banque de sang, et ne disait rien, bien que ça ne lui plaisait guère.

C’est à ce moment précis que la porte de l’infirmerie s’ouvrit. Sur la tête ensanglantée d’un mec qui revenait visiblement d’une petite fête à l’isoloir. Valérian Videl. Enora eut un haut le cœur dès qu’elle le vit. Le pire, c’était l’immonde sourire qui leur offrait, le genre de sourire qui met en doute plusieurs choses. A savoir si la personne en face de vous a un cerveau, ou alors si l’avait oublié dans sa salle de bain. En fait non, le pire c’était bien le « Salut les gars ! » qui leur lança joyeusement alors qu’ils étaient logiquement ennemis. L’irlandaise se frappa le front de sa main libre. Ce mec était désespérant.

La jeune irlandaise ne s’étonna pas quand Dreiden somma Loebhan de lâcher son bras. Sans faire attention à leur altercation, Enora fixa juste son bras, légèrement dégoutée d’avoir la bave pleine d’ADN de sa vieille connaissance sur son anatomie. Qui lui suce le sang était relativement normal, mais le lui lécher, c’était déjà plus ragoutant. Mais bon, c’était Loebhan, Enora avait arrêté de chercher des explications plausible sur ce type. D’ailleurs il avait fini de se battre avec Dreiden qu’il sauta sur Eagle avant de se tirer aussi sec. La couleur de la peau de Captain était déjà en train de se confondre avec celle de ses cheveux. Il tenta bien de se rattraper aux branches, mais Dreiden prit un malin plaisir de lui couper l’herbe sous les pieds. Et Enora ne se fit pas prier pour continuer, un grand sourire aux lèvres.

« Mais ne t’inquiètes pas Cap. Tu pourras me confier toute tes peines de cœur ce soir, pendant que je te limerais les ongles en écoutant des chansons d’amour qui finissent bien ! »

Il n’en fallait pas plus pour que son visage se renferme et qu’il lui fasse la gueule. Mais Enora aimait bien Eagle. C’était tellement simple de le faire enrager dès qu’on mettait en doute sa virilité. C’était vraiment superflu en plus, vu que le rouquin était assez baraqué pour faire passer l’envie aux gens de se foutre de lui. Mais les suicides s’en donnaient à cœur joie. Surtout Enora qu’il n’avait jamais tenté de frapper et dont il supportait les mauvaises blagues avec un calme olympien. Il y avait surtout de fortes chances pour que Captain se défoule sur d’autres personnes.

Mais le problème pour le moment, c’était cet abruti de Valérian. Enora devait bien l’avouer, ce mec lui filait des sueurs froides. Rien que d’entendre son rire lui donnait envie de se barrer en courant. Instinctivement, elle se rapprocha de Dreiden, pendant que Doc s’efforçait de lui soigner le bras. Ce dernier semblait passablement remonté de voir que Loebhan avait encore une fois disparu sans demander son reste. La tentative de fuite des trois suicides se solda par un échec cuisant, et ils durent donc rester en train de supporter l’autre imbécile derrière eux, pendant que le temps semblait s’écouler à l’envers. Eagle passait le temps en boudant, et Enora regardait l’air de rien Dreiden en train de s’évertuer à vérifier que ses tatouages n’avait pas disparus. Après chaque mission c’était toujours le même cirque. Finalement, elle reporta son regard sur l’horloge de l’infirmerie, pour vérifier que le temps avançait bien à la vitesse requise. Combien de temps Doc comptait les garder ici ? C’est bon, il s’était occupé d’eux, maintenant il leur fallait juste une bonne nuit de sommeil et on en parlait plus. Mais bon, il y avait encore un truc à faire. Surement leur filer des antis douleurs ou des trucs comme ça.

Occupée à ruminer dans son coin, elle n’entendit pas non plus Valérian dans son coin qui avait bel et bien l’intention d’étrangler son ami. Tout d’abord, elle resta stoïque, stupéfaite. C’est clair, ce type avait le cerveau grillé. Il y avait deux secondes, il était en train de rire comme un crétin, et maintenant le voilà avec la ferme intention de commettre un meurtre. Pourtant pour une fois Dreiden n’avait rien fait de mal à l’encontre du Madgang. C’était assez rare pour mériter d’être souligné. Rapidement, la jeune irlandaise vit rouge, se saisit avec rapidité du bras de l’importun, et d’un geste sec, le retourna. C’était un truc qu’elle maitrisait bien, avec l’arrachage d’oreille. Une fois libéré de la poigne de Valérian, Dreiden eut tout le loisir du monde de le relever, furieux, avant de se jeter sur l’autre imbécile pour lui apprendre la vie.

Enora ne se mêla pas à la petite bagarre, ne contentant de regarder tout ça avec un sourire en coin. Eagle se leva pour s’approcher et admirer le spectacle de son côté. Mais ça ne dura guère longtemps, vu que Doc déboula assez vite pour les séparer. Avant qu’il puisse râler, Enora attrapa le bras de Dreiden et le tira vers la sortie.

« Bon, bah c’est pas tout ça, mais on va y aller. »

Le regard de Doc se durcit visiblement pendant qu’il répliqua « Non, vous n’irez nulle part… »

« Tu nous as soigné, on va très bien. Et on va te laisser pour que tu puisses te concentrer sur Valérian. A la prochaine ! »

Elle ne se fit pas prier pour sortir, Dreiden sur les talons, Eagle qui les suivaient de près, et Doc qui maugréa une menace à leur attention. Enfin… aucun risque de se retrouver à l’isoloir pour si peu. Enfin, normalement.

« Bon, on va où ? » dit la brunette à ses deux compères, une fois qu’ils étaient assez éloignés de l’infirmerie pour pouvoir arrêter de fuir lâchement.
« N’importe, tant qu’il n’y a pas Loebhan. » Marmonna Eagle qui recommençait à rougir. Enora crevait d’envie de l’enfoncer encore plus, mais elle fit preuve de bonté pour une fois. Finalement, les trois décidèrent de se rendre à la salle de musique. Refuge des Suicides Bombers. Quelle originalité.
Sur place, il n’y avait personne. Si ce n’est, Loebhan. Enora aurait cru qu’Eagle se serrait tiré aussi sec, mais le grand rouquin se jeta sur lui pour le tabasser. Si ce n’est pas mignon.

Pourtant elle aurait bien aimé entendre Loebhan jouer un peu plus avant qu’il ne se fasse attaquer par Eagle. Le son du piano était toujours relaxant, même joué par un type pareil. Mais bon, il fallait avouer que passer à côté de la distraction que pouvait offrir une rixe entre le rouquin et le breton, ça aurait été dommage. Inutile de savoir qui allait gagner, Eagle lui-même savait l’issue de ce combat. Mais ça devait le détendre, comme si la mission pénible qu’ils venaient de vivre n’avait pas suffi à ça. Enora elle-même n’aurait pas dit non à une petite bagarre. Dreiden avait eu son lot avec Valerian, Eagle avait Loebhan… Enora ne comptait pas cracher sur la prochaine occasion de se défouler. Chacun son tour, merde. Elle ne résista même pas quand Dreiden l’attrapa pour la forcer à s’asseoir sur lui. Voilà un bon moment qu’elle avait renoncé à lui faire comprendre que bon sang, elle était chef elle aussi et qu’elle devait avoir une image qui impose le respect. Elle se contentait juste de pourrir la sienne à coup de câlin de son côté. La phrase que lui chuchota son ami lui arracha un rictus.

« T’as vu l’humeur massacrante de Cap ? A tous les coups il est déjà en cloque. »

Lui répondit-elle sur le même ton. Pourtant Enora était toujours mal à l’aise quand on parlait de ce genre de chose. Un souvenir assez douloureux y était directement relié. Elle dut prendre sur elle pour ne pas afficher une mine délabrée, mais son regard était déjà lointain et penseur. En train de ruminer cette situation difficile, tous les problèmes que ça avait pu engendrer, et toutes les répercutions que ça avait eu sur sa vie, elle sortit de sa torpeur quand Eagle claqua la porte, outré. Ah zut, elle avait raté un truc important. Fait chier. Elle eut à peine le temps de mettre les pieds sur terre qu’elle sentit quelque chose de purement désagréable. Des chatouilles. Saleté de Dreiden. Quel est l’intérêt de la faire s’asseoir sur lui si c’était pour la virer de manière aussi vile ?! Comme à chaque fois, l’irlandaise s’effondra lamentablement, hurlant de rire alors qu’elle avait bizarrement envie de finir le travail qu’avait commencé Valerian. Heureusement qu’il n’y avait personne de comportement dans le coin, sinon elle serait déjà morte de honte.

Une fois calmée, elle se releva péniblement en marmonnant des insultes fleuries en direction de son meilleur ami. Et puis son attention fut captée sur Major qui venait d’entrer, complétement bourré. Elle s’avança naturellement vers lui pour l’aider à marcher sans se casser la figure, mais les jumeaux Fitzberg firent leur apparition à leurs tours. Et pas en meilleur état. Trois mecs complétements ivres à gérer, et en plus ils avaient même pas prit la peine de ramener un fond de bouteille pour partager. Quels égoïstes ! Ils étaient en train de marmonner des trucs, mais Enora, en bonne étrangère, ne comprit pas tout, et l’alcool faisait qu’ils n’articulaient guère. L’irlandaise hésita à les dénoncer pour qu’ils décuvent à l’isoloir. Mais de un : c’était un service rendu à l’administration, et ça ce n’était pas possible. De deux : Major devrait y aller aussi, et de trois : les Madgang aimaient aller à l’isoloir, ça leur ferrait trop plaisir.

Elle observa Raphaël se diriger vers Loebhan avant de lui sortir une réplique digne d’un film romantique. Enora croisa les bras en souriant, quel allumeur ce ‘Bhan, décidément. Mais ce dernier se ferma hermétiquement avant de répliquer d’un coup de poing. Elle aurait volontiers regardé la bagarre qui se préparait, si seulement Major n’avait pas trébuché sur un des fils d’enceintes et manquant de s’étaler sur la délinquante qui par miracle eut assez de réflexes pour éviter de se retrouver par terre une seconde fois. Enora tenta tant bien que mal de relever le bassiste complétement bourré, qui bizarrement pesait bien lourd malgré sa maigre silhouette. Mais loin d’être d’humeur à jouer la bonne samaritaine, elle voyait en Major un excellent bouclier anti Marius. Depuis que ce dernier avait tenté de la draguer, Enora refusait d’être en contact direct avec cet énergumène. D’ailleurs elle eut raison d’utiliser Major vu que le dit Marius avait bel et bien l’intention de s’approcher d’elle. Il baragouinait un truc qu’Enora avait peine à comprendre, pourquoi les gens parlaient tous bizarrement quand ils étaient bourrés ? Sans plus d’hésitation, et avec une grâce discutable, l’irlandaise poussa purement et simplement Major sur Marius. Et de deux en moins. Bon, c’était dommage pour Major, mais ça lui apprendra à partager l’alcool avec l’ennemi.

Alors qu’elle se frottait les mains d’un air satisfait, la porte s’ouvrit avec fermeté. C’était qui cette fois ? Eagle revenait après s’être rendu compte qu’il avait oublié sa dignité ici ? Non. C’était Karine. Bordel.

« Je peux savoir ce que c’est que ce cirque ?! » brailla la surveillante en fixant les personnes présentes tour par tour.

Un cirque ? Où ça ? Putain d’expression française à la con. Enora n’y trouvait jamais d’explication plausible. « Rien du tout. » Claironna l’irlandaise en attrapant à contre cœur le bras de Major pour le remettre debout. On n’avait pas besoin d’un suicide à l’isoloir et la jeune femme fixa le bassiste d’un œil noir. Elle semblait dire juste avec ses yeux verts : « Toi mon petit, si tu tiens à la vie, t’as intérêt à feindre la sobriété. Sinon je t’arrache le peu de virilité qui te reste ! »

Quand Karine était là, ce n’était jamais au bon moment. A croire qu’elle avait un radar à emmerde dans le crâne et qu’elle se dirigeait toujours pour les faire chier quand il ne fallait pas. Enora tourna la tête quand elle entendit le son d’une collision, elle comprit rapidement ce qui s’était passé en voyant Dreiden se frotter la mâchoire en insultant Loebhan. Si Karine n’avait pas été là, elle se serait surement payé sa tête. La surveillante était remontée en voyant tout ce beau petit monde, et en voyant que le breton s’approchait, Enora se prépara à l’éventualité de se retrouver à l’isoloir. On ne savait jamais ce que ce type pouvait dire. Elle poussa un discret soupir de soulagement en voyant qu’il était en train de prendre leur défense. Dreiden et elles prirent leur air le plus sage possible, alors qu’Enora pinça discrètement et sans vergogne le bras de Major pour qu’il se redresse et donne l’impression d’être en bon état. Un peu brutal certes, mais Enora ne faisait pas dans la dentelle. Vu que le bassiste se remit légèrement sur ses pieds, ça avait dû faire son effet. Karine et Leobhan disparurent avec les deux Mad, surement en direction de l’isoloir. Enfin, un peu de calme, de tranquillité et… Major qui vomit. Joie. Enora bondit d’un mètre en arrière et poussa un cri à mi-chemin entre la colère noire et le dégout en fixant cette mixture douteuse qui gisait au sol. Enora l’aurait volontiers engueulé, mais son meilleur ami fut plus rapide qu’elle. L’irlandaise remonta légèrement son t-shirt sur son nez en fronçant les sourcils. L’odeur n’était pas spécialement agréable.

Bon, ça commençait à faire beaucoup pour une seule journée et elle commençait à fatiguer un peu la petite. Elle n’avait pas besoin d’en rajouter pour Major, vu que Dreiden lui envoya en prime une belle gifle. Ce dernier était tellement remonté qu’il dévisagea méchamment tous les membres du gang qui s’aventurait à entrer ici, Neill y comprit. Mais ça ne dérangea pas ce dernier qui s’empressa de brancher sa guitare pour s’entrainer tout seul. Les autres membres du gang discutaient dans leur coin. Bon, ça avait l’air de s’être calmé. Il n’y avait qu’à attendre l’heure du diner calmement. Dreiden, soudainement las, la saisit par le bras pour qu’ils s’affalent dans un coin de la pièce, au calme. L’irlandais posa sa lourde tête sur l’épaule de la délinquante, cette dernière écarta soigneusement quelques mèches. Enfin ils avaient la paix. L’adrénaline redescendue, elle commença elle aussi à fermer ses paupières. Curieusement, l’explosion et le tremblement ne la fit pas plus sourcilier que cela. Ça la tira de son sommeil, mais elle mit ça sur le compte de Dreiden qui avait dût bouger. Par contre, la sensation de froid, ça, elle le sentit très bien passé. Elle jura dans sa langue natale avant de se redresser sur ses pieds. L’irlandaise constata les dégâts, le bordel, l’eau froide et le bruit de l’alarme… la moutarde lui monta au nez très rapidement, et elle se dirigea de pied ferme vers Neill, qui était visiblement le responsable de ce carnage. Ce dernier était stoïque, et derrière son masque à gaz, on devinait qu’il jetait des coups d’œil effarés autour de lui. Visiblement il avait lui aussi du mal à croire qu’il avait pu causer tout ça à lui tout seul. Et sans l’aide d’une grenade.

Enora se rua sur lui, et lui arracha violemment le masque de la tête. Elle savait qu’il était sujet au stress et à l’irritation dès qu’il ne l’avait plus, mais c’était le cadet de ses soucis. Elle lui lâcha une flopée d’injure de toute sorte pendant une bonne minute avant d’écraser son poing dans la figure de l’imprudent.

« T’es vraiment un incapable ! » cracha-t-elle sur le pauvre guitariste qui ne savait décidément pas quoi répliquer devant une fille qui faisait une tête de moins que lui et qui avait la main lourde. « Si l’administration nous tombe dessus, on va tous finir à l’isoloir ! Et j’ai pas envie de payer pour tes conneries ! »

Neill finit par réussir à articuler quelque chose, et plaida l’incident. « C’est vrai quoi… notre matos est pourri, il suffit d’un rien pour que ça fasse un court-circuit ! »

Enora maugréa dans sa barbe et chercha rapidement un moyen de les sortir de là. S’enfuir rapidement, se sécher dans leurs chambres respectives et dire que c’était pas eux ? Personne ne marcherait, c’était leur QG. Mais ça valait le coup d’essayer. Au pire, c’était l’isoloir de toute façon, ça ne changerait rien. Elle leva la voix pour se faire entendre malgré cette putain d’alarme. « Bon les mecs. On se sépare. Tirez-vous rapidement, et celui qui se fait prendre par l’administration… je le plains. »

Sans plus de cérémonie, elle attrapa le t-shirt de Dreiden, ignorant le léger craquement des coutures du tissu, pour courir le plus rapidement possible vers les dortoirs. Sur le chemin ils croisèrent Eagle, qui les dévisagea avant de demander ce qui s’était passé. Après une rapide explication, il s’écria « Ma batterie ! » et fonça vers la salle de musique sans qu’Enora ait le temps de le prévenir qu’ils étaient justement en train de fuir pour éviter de se faire choper. Tant pis qu’il se démerde. Elle et son meilleur ami se rendirent donc rapidement dans la chambre de Dreiden, qui était aussi celle qu’Enora squattait la plupart du temps. Il y avait plus qu’à espérer qu’ils ne les suivent pas ici.

« Bon. Pour être parfaitement blanchis, faut qu’on soit sec. De toute façon on peut pas rester comme ça. » Lâcha-t-elle en regardant son t-shirt trempé qui devenait désagréablement moulant. Son attitude n’avait pas changé, mais les yeux qu’elle leva vers lui semblaient lui supplier "Bon mec, on a pas le choix, prête moi des vêtements."

Elle n’avait même pas eu le temps de répliquer qu’il l’avait déjà enfermé dans la salle de bain. Elle aurait été volontiers vexée si l’idée d’une douche n’était pas séduisante. Même dans un endroit aussi désert de tout confort. Elle ignorait pourquoi il lui avait dit de fermer la porte à clé, mais elle ne le fit pas. Les serrures d’ici n’étaient pas très sûres et il y avait des risques qu’elle finisse enfermée à l’intérieur. Non merci. Sans plus de cérémonie elle retira ses vêtements poisseux, pas mécontente de s’en débarrasser. L’eau de l’alarme incendie devait être tout sauf propre vu la sensation de crasse qui lui collait à la peau. Ses cheveux aussi avaient besoin d’un lavage rapide. L’irlandaise détourna pudiquement le regard du reflet de son corps dans le miroir avant de commencer à se laver. Enora aurait pu passer des heures sous l’eau chaude, mais il y avait Dreiden complétement trempé dans la chambre, et elle opta pour une douche express. Le plus long fut évidemment de laver soigneusement son épaisse et longue tignasse brune, ça prendrait des heures à sécher correctement. Son regard tomba sur son bras soigné plus tôt par Doc. Bon sang, le bandage était foutu, il fallait retourner voir le médecin, et pour sûr qu’il sera de très mauvaise humeur. Elle coupa rapidement l’eau avant d’entreprendre de se sécher et de s’habiller avec les vêtements gracieusement prêtés par son compère. Aucun souci pour le-t-shirt, même si il était hors de question de remettre son soutien-gorge trempé, par contre, le pantalon était bien trop grand. Non pas qu’Enora était de nature svelte, mais la cuisine d’ici était tellement mauvaise qu’elle prenait du muscle a vu de nez sans prendre de poids. Forcément, ça avait des répercutions. Enora vérifia que son t-shirt était assez ample et grand pour ne pas passer pour une exhibitionniste, et ouvrit la porte avec la ferme intention de demander à Dreiden une ceinture.

… Mais bon sang, qu’est-ce qu’il était en train de faire ? Il avait dû entendre la porte s’ouvrir vu qu’il stoppa son geste, en sachant pertinemment dans quelle situation il était. De là où elle était, Enora avait une vue imprenable sur la chute de reins de son ami, et elle aurait été bien mauvaise langue de dire que c’était désagréable. Depuis le temps qu’ils trainaient ensemble, ce n’était pas la première fois qu’ils étaient dans une situation gênante, mais jamais il y avait eu de muscles fessiers inclus. Enora se rendit compte après quelques secondes qu’elle avait les yeux rivés sur l’anatomie de Dreiden, fort heureusement il avait toujours le dos tourné, et attrapa rapidement une serviette avant de s’avancer vers lui. Au moment il se retourna avec des yeux qui jetaient des missiles, elle lui passa la serviette sur les épaules en tentant de garder son calme.

« Non mais vraiment. T’habiller alors que t’es trempé… tu veux attraper la mort ? T’as du bol, imagines si c’était quelqu’un d’autre qui ouvrait la p… »

C’est toujours dans ce genre de situation que l’irréparable se produit. Alors qu’elle était en train de parler, elle fut coupée par la porte en train de s’ouvrir. Comme dans un mauvais TV show américain. Grâce à la serviette l’honneur et l’intimité de Dreiden étaient saufs, mais avec Enora en petite tenue en train de lui passer la serviette, l’imagination n’avait pas beaucoup d’effort à fournir. Et d’ailleurs vu la tête qu’ahurit que tira Major –cette fois-ci sobre- quand il ouvrit la porte, c’était visiblement ce qu’il pensait aussi. On aurait dit un gamin qui avait surpris ses parents. Enora imagina un instant ses doigts autour du cou de cette abruti, et elle ne se priva pour lui cracher :

« Je peux savoir ce que tu regardes ?! »

Il bafouilla une excuse et fermera la porte sans plus tarder. Encore un truc qui allait alimenter les rumeurs. Misère de misère… Enora avait bien besoin que cette gêne se termine au plus vite. Et pour ça, elle ne trouvera rien de mieux que de tourner le dos à Dreiden, histoire de le laisser avec la serviette.

« J’avais juste besoin d’une ceinture. Le pantalon est trop grand. » Lâcha-t-elle dans un mélange de gêne et de timidité qui était plutôt inhabituelle chez elle. Elle ignorait si le rouge lui était monté au joue, et elle ne voulait surtout pas le savoir. Pourquoi en faire une telle affaire, c’est vrai quoi, elle l’avait juste vu à poil … bon sang. Et pour couronner le tout, elle aussi n’était pas forcément dans une tenue très appropriée. Il n’y avait rien qui pouvait lui arrivé de pire, là tout de suite. Sauf peut-être quand on toqua à la porte.

« Major, si tu dégages pas dans la minute, je jure que je te tue moi-même. »

« C’est Angela et je crois que vous avez quelque chose à me dire… »

Quand on a touché le fond, on peut toujours creuser.

C’était relativement compliqué de réfléchir vite ET bien. Enora avait suivi Dreiden du regard alors qu’il se dirigeait vers la salle de bain, surement parce qu’il n’était toujours pas habillé et qu’il avait l’air de supporter le regard de l’irlandaise. Il avait l’air tellement sûr de lui en inventant son stratagème, qu’elle ne trouva pas le courage de lui dire que c’était inutile parce qu’elle l’avait menacé en pensant que c’était Major. Et que par conséquent, elle savait qu’ils étaient là. Son compère s’enferma dans la douche et la laissa se débrouiller toute seule avec Angela. Enora fronça les sourcils. Bon certes, il était à poil et trempé, mais bon ce n’était pas à elle de gérer tout le conflit à elle toute seule non plus ! La porte était en train de s’ouvrir, presque au même moment ou celle de la salle de bain se refermait et Enora se rendit compte qu’elle avait toujours le pantalon dans ses mains, sans l’avoir enfilé. Angela eut donc la bonne surprise de trouver une Enora avec des gambettes nues. Rasées fort heureusement. Dans son malheur elle avait de la chance. Bon, foutue pour foutue, autant s’asseoir sur le lit et prendre son temps pour enfiler ce pantalon, ça lui donnait quelques secondes de répit pour trouver quoi dire à Angela qui n’avait pas vraiment l’air d’être ici pour une visite de courtoisie.

« Quitte à t’enfuir, tu aurais mieux fait d’aller dans ta chambre, au moins tu aurais des vêtements à ta taille.»

Enora tenta de ne pas réagir, mais elle ne put s’empêcher de se mordre la lèvre inférieure. Une telle insinuation la gênait. Enora ignorait si Angela se doutait que l’irlandaise passait quasi toute ses nuits dans cette chambre plutôt que celle qui lui était attribuée dans le dortoir pour fille. En tout cas la grande blonde devait se dire que ce n’était pas pour faire du tricot. Être dans une tenue pareille devait pas aider. Il fallait être aveugle pour ne pas voir que c’était des vêtements d’hommes prêtés pour l’occasion. Heureusement que Dreiden était sous la douche en fait. Une fois habillée et debout, Enora voulu nier l’accusation à peine dissimulée dans les propos d’Angela, mais rien ne lui vint en tête. Elle savait qu’ils étaient dans la salle de musique, et qu’ils avaient changés de vêtements pour d’autres plus secs, et le fait qu’ils s’étaient enfuis était une preuve de culpabilité. Enora n’aimait pas l’isoloir, mais elle s’y rendait volontiers quand elle avait fait volontairement une connerie. Sauf que ce n’était pas du tout le cas, c’était la faute de ce con de Neill. Purée, quand elle aura posé la main sur lui, elle ne promettait pas qu’il s’en sorte avec ses deux oreilles…

Elle n’avait toujours rien répondu quand Dreiden sorti de la douche, à peine sec, mais cette fois-ci habillé. Angela le regarda avant de se mettre à applaudir d’une façon qui sentait le foutage de gueule, et enfin elle alla droit au but. Enora, comme Dreiden, se voyait déjà dans l’isoloir, et ça ne lui plaisait qu’à moitié. Elle détourna la tête par dépit, sentant que ça allait être leur fête pour cette fois. Encore. Sauf qu’ils n’avaient rien fait. Bon okey, s’enfuir en courant ce n’était pas une bonne idée elle pouvait l’admettre, mais disons que dans un centre pareil ou on risquait sa vie à chaque fois qu’on faisait un pas, on devenait très facilement paranoïaque. Enora devait avoir contracté les premiers symptômes, ça faisait pourtant deux ans qu’elle était là. Elle aurait voulu répliquer, mais les deux délinquants se turent devant l’autorité naturelle que dégageait Angela. C’était tellement énervant, Enora n’arrivait décidément pas à la détester. Pourtant c’était pas faute d’essayer. Après quelques secondes de silence, Enora voulait lui dire de couper court et de les amener tout de suite à l’isoloir, au lieu de les faire mariner sur place. Mais Angela fut plus rapide qu’elle :

« Les caméra de surveillances étaient en marche et nous savons ce qui s’est passé. Mais la prochaine fois que vous jouez les fuyards, c’est l’isoloir sans discuter, Neill y est déjà. Nous avions pensé à vous faire nettoyer les dégâts en guise de punition mais… » Elle les regarda brièvement tour à tour « Vous n’avez pas la tête de fées du ménage, et il y a déjà assez de casse comme ça. On verra plus tard. »

Elle tourna gracieusement les talons et quitta la chambre sans rien ajouter, laissant les deux jeunes gens dubitatifs sur place. C’est tout ?! C’est pour ça qu’elle était venue ici ?! Bon, on allait dire que c’était un avertissement. Une fois la porte refermée, et l’adrénaline redescendue, Enora soupira bruyamment.

« Pauvre Neill. J’espère qu’il sera pas trop amoché en sortant… »

Oui bon, elle avait eu la ferme intention de lui arracher la tête il y avait à peine une minute avant. Mais bon, on expliquait plus les changements d’attitude d’Enora. Bon, visiblement ils allaient quand même recevoir un blâme pour avoir pris la tangente. Restez à savoir ce qui était arrivé à Eagle, et plus particulièrement si ce dernier avait pu sauver sa batterie. Quant à la scène précédente à propos de douche, de serviette et de rinçage d’œil, elle préférait ne plus en parler. C’était assez gênant. Mais pas tout de suite. L’excitation était retombée, et déjà que depuis le retour de mission, elle crevait d’envie de dormir, la douche ne l’avait pas réveillé, et ses yeux menaçaient de se fermer tout seul. Elle se serait volontiers avancée en titubant vers le lit pour s’écrouler dessus et dormir, mais la sensation d’un liquide chaud sur son bras la rappelait à l’ordre. Elle jeta un regard à la blessure faite plus tôt par une tache, le bandage était foutu et il fallait retourner voir Greg. Elle grimaça, elle n’était pas ravie de s’y rendre, mais elle n’avait pas vraiment le choix. Elle en parla à Dreiden et ils se mirent de concert en route vers l’infirmerie. Retour au point de départ. Sur place, ils eurent droit au regard noir du doc, ce dernier leur demanda sèchement de s’asseoir le temps qu’il aille préparer le nécessaire. Dans son antichambre, on pouvait parfaitement l’entendre râler sur tout ce putain de boulot qu’il faisait pour rien. Enora posa sa tête sur l’épaule de Dreiden, prête à dormir le temps qu’il fasse son œuvre, mais la porte s’ouvrit. Sur Eagle, accompagné par un membre des suicides. Le rouquin avait le visage blême et le regard exorbité du type qui a vu un fantôme. Son accompagnateur alla avertir le docteur que Captain avait été témoin d’un tragique incident et avait besoin d’un bon remontant.

Visiblement il n’avait pas pu sauver sa batterie.

Elle était tellement fatiguée que l’idée de faire l’aller-retour jusqu’à la chambre semblait être le bout du monde. Ils auraient dût aller piquer un somme dès le retour de mission en fait. Ça leur aurait évité de se prendre toutes les conneries du monde sur le coin de la figure. Enora et le reste de la troupe se traînèrent lentement vers la salle derrière l’infirmerie. Eagle n’avait même pas levé les yeux vers eux, visiblement secoué. Les médicaments donnés par Doc n’aidaient pas vraiment. Le rouquin avait franchement l’air de planer, mais dans le mauvais sens du terme. Le pauvre, entre la mission, les attaques de Bhan, et la perte de sa batterie, il n’avait pas vraiment profité du reste de la journée non plus. D’ailleurs il s’effondra sans plus de cérémonie sur un des lits. Enora s’apprêta à l’imiter, mais Dreiden lui rappela qu’elle avait oublié de faire quelque chose avant. Ils avaient leur propre façon de se dire bonne nuit.

Enora avait l’impression qu’une minute s’était écoulé entre le moment où elle s’est allongé paisiblement, et entre celui où elle sentit qu’on lui agrippait les cheveux et lui plaquait la main contre la bouche. Encore la tête dans le cirage, elle comprit que quelques secondes plus tard qu’un imbécile venait de la redresser, et qu’elle était tenue trop fermement. Sauf qu’il ne fallait jamais laisser ses doigts non loin des dents de l’irlandaise, qui ne se priva pas pour en mordre un. L’intéressé l’insulta fortement, mais ne lâcha pas sa proie. L’un d’entre eux dût surement voir la scène parce qu’elle senti qu’on lui donnait un coup de poing dans le ventre. Ceci acheva de la réveiller pour qu’elle scrute la bande de connards qui osaient les déranger pendant qu’ils pionçaient. Le MadGang, bien évidemment. Elle se demanda l’air de rien où étaient les jumeaux, mais sa mémoire finit par se souvenir qu’ils étaient à l’isoloir.

Ce qui suivit lui plut encore moins. Dreiden réveillé de manière aussi peu orthodoxe, et ensuite contraint et forcé d’aller libérer les deux pecnos à l’isoloir. Déjà, c’était relativement désagréable à entendre. Mais alors, passer pour la princesse à sauver, ça c’était inacceptable. Bordel, mais pourquoi c’était tout ELLE qu’on choisissait pour ce genre de rôle à con ? Enfin, la réponse n’était pas dure à trouver : c’était une femme. Préjugé de merde. Elle jeta un œil à Eagle, qui devrait être plus dur à maitriser qu’elle… et bah non. Il était toujours en train de roupiller sur place. Vu le poids en muscle que faisait le bestiaux, ils étaient deux à devoir le porter. C’était presque comique. Il fallait pas compter sur lui pour cette fois.

Enora était en train de se retourner le problème des dizaines de fois dans sa tête, mais rien à faire, elle ne trouvait pas de solution salvatrice. Et même si elle en trouvait une, elle n’était pas vraiment certaine de pouvoir en faire part à Dreiden par télépathie. Mais bon sang, où était Doc ? Comment il avait pu laisser l’infirmerie sans surveillance ?! Il y avait anguille sous roche. En plus elle avait la désagréable impression que celui qui la tenait était un peu trop collé à elle. Dreiden disparut avec Magdalena, poussé en avant par les autres, et il avait l’air encore moins bien réveillé qu’elle. Il ne restait que Lucius, celui qui tenait Enora, et les deux qui portaient Eagle.

« Bon, on en fait quoi d’eux? »
Lucius se gratta le menton, ignorant les insultes que lui lançait l’irlandaise.
« Restez ici avec eux le temps que l’autre libère les jumeaux. »

Lucius quitta les lieux, surement pour aller rejoindre les autres en salle de musique, le temps que Dreiden fasse le sale boulot. Enora se sentait humiliée, à devoir rester ici comme une plante verte, et l’autre crétin n’était toujours pas décidé à la lâcher. Il n’y avait rien à faire, si ce n’était attendre. Mais un bruit vint alerter l’assemblée. Une porte venait de s’ouvrir, et la voix de Doc râlait une énième fois, cette fois-ci sur la fausse alerte qu’on lui avait indiquée. Bon, cela expliquait comment les mad avaient réussi à s’infiltrer ici. L’autre gugusse tenta instinctivement de bâillonner l’irlandaise, mais il lui suffit de frapper un grand coup de pied dans le mur pour alerter le médecin. L’arrivée de ce dernier ne tarda pas, et une fois le pot aux roses découvert, c’était relativement facile pour Enora de surprendre son assaillant en lui brisant le nez avec un coup de tête en arrière.

« Je te laisse le reste, j’ai un truc à faire ! »

Lâcha-t-elle avant de courir vers l'isoloir pour rattraper Dreiden et Magdalena. En chemin elle croisa la jeune fille, marchant tranquillement sur le chemin du retour, seule. Elle ne fit même pas attention à Enora, lui accordant à peine un regard. Ça signifiait que Dreiden était déjà en train de faire ce qu’on lui avait demandé, c’était trop tard. Bordel. Elle pesa le pour et le contre environ une demi-fraction de millième de seconde avant de finalement se décider de rejoindre « Dreidi ». Il y avait encore une chance de le tirer de la mélasse.

Ah miracle. Il était juste devant l’entrée. L’irlandaise lui sauta littéralement dessus pour lui faire l’attaque du câlin tueur, avant de lui hurler dessus en anglais :

« Mais t’es complétement con ou quoi ? Pourquoi t’as accepté de faire un truc pareil ? »

Elle savait bien qu’il n’avait pas eu le choix, mais elle n’y pouvait rien, ça la dépassait. Enfin, maintenant qu’elle était libre comme l’air, ils pourraient rentrer à la chambre, finir leur nuit, et oublier cette histoire. Enfin. En théorie. Ils remarquèrent surement après que Karine et Doc étaient là, pas vraiment l’air ravis, voire même assez menaçants. Enora aurait dût s’en douter, les mad restants à l’infirmerie avait dût dire qu’elle et Dreiden comptaient libérer Neill.