Lorsqu’ils étaient venus, Blume ne dormait pas.

Les yeux grands ouverts, il fixait le plafond de sa chambre. A quelques mètres de lui, il entendait le souffle régulier de son colocataire, et dans les couloirs, les bruissements d’une ventilation essoufflée ; il n’y avait pas d’autre bruit, dans cette nuit paisible où il ne trouvait pas le sommeil. C’était bien le seul moment où le Centre paraissait calme. Perdu dans cette semi-pénombre, Génésis sommeillait.

Du moins, c’était ce qu’il pensait jusqu’à ce que l’alarme retentisse.

Tout alors s’était passé trop vite. La lumière, les cris, les bruits de course dans les couloirs, les ordres aboyés, quelqu’un était rentré dans leur chambre, il avait vu Innocent se faire entraîner en se débattant ; on lui avait à peine laissé le temps d’attraper ses fringues de la veille, que déjà il était poussé dans le couloir par les surveillants, dans cette mêlée informe qui n’avait qu’une destination - la gare. Il allait encore falloir dégommer de la Tache. Allons bon.

Il avait enfilé tant bien que mal ses vêtements à la va-vite, les yeux encore agressés par les lumières vives. Poussé, tiré de chaque côté, dans la foule des pensionnaires qui avaient été attirés sur le quai, il avait aperçu la silhouette de Nina, qu’il avait tenté d’appeler avant que la foule ne les sépare. Il ne saurait pas si elle avait répondu à son appel ; déjà, il était poussé dans un wagon avec trois autres, sans autre forme de procès. De son réveil, au passage dans la salle d’arme, en passant par le discours de John, tout lui avait semblé un rêve. A sa ceinture, la batterie de couteaux dont il s’était équipé était à peu près la seule chose rassurante.

Il ne connaissait aucun des autres pensionnaires. Balloté par les soubresauts du wagon, il leur avait jeté un regard – tous semblaient plus grands, mieux bâtis et plus expérimentés que lui. Il n’était pas particulièrement un gringalet, mais ces trois-là en imposaient. En un sens, c’était peut-être mieux, la mission qu’on leur avait attribuée ne ressemblait pas tellement à une promenade de santé... Dans un grincement à en déchirer les tympans, le wagon s’arrêta. Blume commençait à s’habituer à cette désagréable impression nauséeuse lors de l’arrivée dans le monde virtuel, et il n’y fit pas attention. Près de la porte, il fut le premier à descendre poser les pieds sur le sol de ce nouveau monde – un cri perçant lui fit lever la tête.

C’était un oiseau, étrange et coloré, posé au-dessus de lui sur la plus haute branche d’un arbre. On devinait une fin d’après-midi dans le ciel, l’air était presque doux. Une odeur délicate traînait autour d’eux. Il entendit le grincement du wagon qui repartait sur ses roues imaginaires, n’y fit pas attention – il y avait quelque chose d’enivrant à se retrouver presque à l’extérieur, après toutes ces journées passées confiné entre les murs de Génésis. Si derrière lui, les autres avaient parlé, il ne les avait pas entendus.

Il fit un pas de plus. Une branche craqua. Comme si elles n’attendaient que ce signal, deux Taches s’échappèrent en hurlant des sous-bois, lui laissant à peine le temps de se baisser pour éviter l’attaque et de sortir un premier couteau, faisant volte-face pour leur faire face. Elles étaient de niveau 1 et seraient probablement facile à vaincre, mais tout portait à croire que ce qu’ils avaient devant eux n’était qu’un avant-gout des festivités à venir. Il fallait bien garder le sens du spectacle, et celui-ci venait tout juste de commencer.

[Je suis désolée de m’être avancée comme ça pour l’arrivée des Tâches et tout, mais Blume n’est très bavard alors j’ai préféré faire ça qu’un post inutile, puisque je voulais de toute façon répondre avant de partir en voyage ! Comme je l’ai précisé, les autres peuvent avoir parlé entre temps, il n’a rien écouté /o/ Bref, voilà !]

Vlad, durant l’alarme, n’était pas dans sa chambre, mais dans le dortoir des filles. Il se fait attraper et croit que c’est parce qu’il est là qu’il se fait ramener parles surveillants. Il les suit tranquillement, mais réalise qu’au nombre qu’ils attrapent, ça ne pouvait pas être l’orgie générale. Pendant que devant lui les dirigeants de la place disait en rafale « bla-bla-bla », une haine viscérale pour les langues étrangères grimpe en lui. Aucune idée de ce qui se passe dans ce bordel de centre!

On les conduit directement à la salle d’équipement et observe tout le monde prendre des armes. Ça semblait sérieux, certain qui avait pourtant bonne réputation en combat avait le visage pâle, alors que d’autre semblait tenter de fuir. Il se passait quelque chose de gros, mais quoi? Ainsi, Vlad choisi ce qu’il pensait qu’il pouvait avoir de besoin. Son fidèle canon à pieux, dont la ressemblance avec les pieux utilisés pour les chemins avait quelque chose de relativement comique pour lui, une douzaine de grenades qu’il tente de faire passer sous le nez des surveillants en insérant les armes explosives dans ses bandages se trouvant sous ses vêtements. La bombe humaine observe le reste, il avait évidemment besoin d’une arme blanche, mais doit prendre son temps pour trouver laquelle irait le mieux dans n’importe quelle situation. Il choisi un gros poignard malléable à un seul tranchant. Juste avant de partir, il prend un bouclier petit et pratique fait pour résister à quelques attaque de tache et un sac et met à l’intérieur des pansements, des bandages et une bouteille d’eau. Ils vont dans un monde virtuel, mais avoir virtuellement soif c’est chiant.

Aujourd’hui, il crèverait peut-être, au moins il ferait en sort que ce soit en s’amusant. On n’a pas besoin de le pousser pour qu’il entre dans le wagon, à sa taille des recharges lourdes et épaisse s’y trouvaient entassé dans deux cordes résistantes, mais courtes. À l’intérieur du wagon, il donne un coup d’oeil sur ses coéquipiers. Aucun d’entre eux n’avait un visage à reconnaitre. Lorsqu’il entend la fin de leur avancé, ils se trouvent dans un espace encore plus psyché-délire que sa dernière mission. Ils étaient chez un détraqué solide! Ce type avait des pommiers orange et des oiseaux turquoises dans la tête? Il entend que les premiers soient sorti du wagon pour sortir aussi. Là, c’est encore pire, l’odeur lui rappelait les donuts de chez Mémé-pute. Levant une main devant ses yeux, le soleil lui rappelle combien cela faisait longtemps qu’il n’était pas sorti. Puis son regard se retour sur ce qu’il y a autour d’eux: La forêt et une plaine... C’est tout. Soit les taches viendraient du ciel ou de la terre, soit de la forêt. Il charge son arme des deux premiers pieux, puis l’accote à son épaule en avançant et s’arrêtant après un moment. Ils devaient attendre les taches?

Un craquement, puis un grognement stridents se font entendre, ils n’avaient plus à attendre. Vlad tourne le regard vers les deux tache de niveau 1, bientôt 2. Déjà les deux chauds de service s’élancent vers elles. Quant à lui, il bouge juste assez pour ne pas être repéré par les créatures et cherche dans sa poche ce que la cuisinière lui avait donné la veille. La gomme à mâché au pamplemousse n’était pas aussi mauvaise qu’elle paraissait. Certes, Vlad n’avait pas l’intention d’aider si les trois autres arrivaient à se débrouiller sans lui. Soudainement, un arbre tombe à quelques mètres de lui et il fait presque crever sa bulle de gomme. Il recommence, jusqu’à soudainement entendre beaucoup plus de crie. Il sort la tête pour regarder d’où cela vient et voit au loin des formes bouger et venir par ici.

Vlad regarde ensuite l’état des deux taches, l’une d’elle venait de se faire tuer par le tireur fou et l’autre s’occupait sur un autre. Il avait la voix libre. Il sort donc de son coin, laissant la job au autre de s’occuper de la dernière tache. Il s’éloigne du groupe un moment, restant tout de même à moins de douze mètres. De là, il accote son arme à une grosse branche pour retenir le recule montre de cette arme. Ouais, elle ne pouvait pas seulement être parfaitement puissante, elle avait aussi des défaut. Après un peu de réflexion et une nouvel ballon au pamplemousse d’éclaté, il trouve la trajectoire parfaite pour aller planter un pieu dans le tronc de l’arbre autour du quel passerait les taches. Mordant dans l’une de ses cordes, il en sort une large et solide ficelle. Il fait passé plusieurs grenades dans la ficelle comme si cela n’aurait été que des aiguilles. Une fois trois des douze grenades accrochées, il fait un noue autour du pieu et attend que les taches soient plus proche. Entre temps, les autres devraient bientôt avoir fini de s’occuper de la seconde tache qui les avaient attaqué. Du moins il l’espère, car après l’explosion qu’il prévoyait, mieux valait partir, les arbres risquaient de tous prendre en feu.

Trois minutes après que la première tache soit tué, il tire.. Et saute vite hors de l’arbre. À trois de ces grenades, ils risquaient de sentir le souffle, même d’ici. À près de cent mètres de l’explosion, Vlad sent la chaleur sur le côté du visage, alors qu’il se dirige vers l’extérieur de la forêt. Il est vrai que cela n’avait sans doute pas tuer toutes les taches, mais ça les ralentirait de beaucoup tous ses arbres dans le chemins ou qui leur tomberaient dessus. Faisant une autre bulle, il sort de la forêt et croit voir un mouvement plus loin dans la plaine. Il attend et donne un coup d’oeil vers là où il croit être le reste de son équipe. S’ils devaient aller par là-bas, il lui faudrait des gens pour se faire attaquer et tuer.

Il n’avait même pas eu le temps de mettre sa casquette qu’il était déjà jeté hors de sa chambre sans ménagement. Fort heureusement il avait pu attraper ses lunettes pour éviter d’être éboulis par les néons des couloirs. Pour une fois qu’il avait réussi à dormir sans trop de problème… il avait vu Loebhan, son colocataire forcé, les suivre sans trop se pressé, comme son statut de privilégié l’autorisait de faire. Tsss. Saleté. Captain fit quand même l’effort de se réveiller entièrement pour écouter les indications, non sans avoir lâché un grognement de désapprobation en se libérant de la poigne du surveillant. Ça va, il pouvait marcher tout seul, pas besoin d’un assistant. Bon, au moins le brief fut aussi simple que d’habitude : on entre, on frappe, on ressort. Mais cette fois-ci on est plus nombreux. A travers ses lunettes teintés, il jeta un regard aux autres présents ici… il y avait un sacré paquet de personnes quand même. Il serait dans la même équipe que Dreiden, mais il était trop de mauvais poil pour lui dire quoique ce soit. Et c’était pareil pour lui. Ils avaient tous les deux hâte de que ça se finisse pour retourner dormir. Sauf que ça ne promettait pas d’être une partie de plaisir.

Les deux autres, il ne les avait jamais vu. Enfin, si peut-être une fois. Mais il n’avait noté aucune altercation avec l’un d’entre eux. Bon, tant mieux remarque. Il se fit emporté par les surveillants et jeté dans le wagon avec le reste de son équipe. Captain Eagle jette un coup d’œil aux armes qu’il a pris avec lui, ses deux Beretta et une bonne quantité de recharges à une ceinture pour pouvoir tenir assez de temps. Ça devrait le faire, d’après le type il n’y avait que des niveaux 1. Enfin… les mauvaises surprises étaient monnaie courante à Génésis, il se méfiait comme de la peste de ce genre de mission.

Le début fut plus ou moins rapide. Deux tâches, aussi moches et chiantes qu’elles peuvent l’être, sortent et se jette sur eux. Dreiden était déjà en train de s’occuper d’une d’entre elle, quand Eagle comptait se réserver l’autre. Ses deux armes en avant, il ne fit pas dans la dentelle pour s’occuper de celle qui s’avançait dangereusement vers lui après que Blume l’ait esquivé. Si bien qu’il en vida complétement ses deux chargeurs de 15 balles. D’un geste rapide et maitrisé qui trahissaient l’habitude, il retira les chargeurs vides de son arme pour les remplacer. Fort heureusement, il avait été assez loin pour éviter d’être éclaboussé par le sang, mais il était sûr que ça n’allait pas duré.

Eagle retourne donc vers le reste de son équipe. Tiens, il en manque un, il s’est déjà fait bouffé ? Il allait poser la question à Dreiden et Blume quand un violent « BOOM » se fit entendre qui le fit sursauter et se tourner vers l’endroit où la déflagration avait lieu. Ça ne pouvait pas provenir du monde virtuel en lui-même. Pas dans un décor pareil, c’était l’autre type avec eux qui en était le responsable. Il n’eut pas vraiment le temps de se poser la question plus en détail quand il vit une bonne dizaine de taches sortir des arbres pour leur foncer dessus. Il fallait s’en douter, la déflagration en avait attiré d’autres.

Captain n’eut pas vraiment le temps de réfléchir avant de dégainer ses armes pour pouvoir tirer sur celles qui s’approchait. L’idée n’était pas de les tuer, mais de les affaiblir pour que le reste de l’équipe puisse les achever. En quelque sorte, il les couvrait.

Blume se retourna vers Dreiden et Eagle.

" Qu'est-ce que... "

BOOM.

Ils n'eurent même pas le temps de se mettre à l'abri. Dans un vacarme du tonnerre, la moitié de la forêt venait d'exploser, déracinant des arbres, arrachant des Taches au sol avec des hurlement - une odeur écœurante de chair brûlée flottait tout autour d'eux, seul vestige des créatures qui venaient d'être détruites. La chaleur de l'explosion arriva vers eux en vagues brûlantes et il toussota, tentant d'extraire de ses poumons la fumée âcre. Il sentait sur ses lèvres le goût du sang de la première Tache, et ça ne le mettait pas en joie. Il avait beau apprécier ses poignards, il préférait les utiliser contre des humains plutôt que contre ce genre de créature, qui lui laissait immanquablement l'odeur et le goût amer de son sang sur ses lèvres. Impossible de les tuer sans donner de grands coups dans le tas, et c'était plutôt salissant.

Lorsque la première Tache avait obstrué le canon de l'arme de Dreiden, c'était lui qui avait dû s'en charger, s'occupant de charcuter avec art les côtés de la bête. Elle était déjà bien amochée par les balles du jeune homme, et d'un lancer de couteau bien visé, il l'avait rendue aveugle, avant de l'éventrer et de lui donner un puissant coup de pied dans le ventre pour lui remuer un peu les boyaux. Visiblement le mec à la mèche bleue avait plutôt mal pris la destruction de son semi-automatique, et était venu l'aider avec de jolis coups de gourdin, jusqu'à ce que la créature s'effondre sous leurs attaques répétées. Le roux, plus loin, semblait s'être plutôt bien occupé de sa propre Tache.

Et puis, voilà. Tout avait explosé.

Attiré par l'explosion, un troupeau de Taches s'avançait à présent vers eux. Au fil du combat, ils avaient reculé jusqu'à se retrouver dans un genre de plaine, à peu près aussi féérique que le reste de la forêt, et du coin de l'oeil, il voyait le quatrième type, celui aux explosifs, se rapprocher d'eux. Avec une grimace face à ce qui les attendait, il essuya la garde de son couteau de chasse contre son t-shirt qui, de toute façon, était bon pour la poubelle. Vous avez déjà essayé de nettoyer du sang de Tache? Pas facile. Du tout. Une longue estafilade, récoltée il ne savait trop quand au cours du combat, teintait de rouge son bras, et il avait déjà une belle collection de bleus et de courbatures, mais ce n'était pas le moment de pleurer. La situation était encore loin d'être dramatique.

Le roux avait déjà dégainé ses flingues. Blume avisa Dreiden et son pauvre gourdin à sa droite et, après une hésitation, détacha un des couteaux de sa ceinture pour le lui lancer. Il avait peu d'armes et n'était pas très jouasse à l'idée de se défaire volontairement de l'une d'elle, mais armé juste de son gourdin, le pauvre n'irait pas loin.

" Tu peux prendre ça " lança-t-il avec une certaine hésitation. " Ce sera sans doute plus efficace. "

Pas le temps pour plus de paroles, les Taches étaient déjà presque sur eux. Elles étaient une quinzaine, énorme, gluantes, hurlantes. Priant pour que l'une des balles d'Eagle ne vienne pas se loger malencontreusement sur lui plutôt que sur une des Taches, il se jeta sur la première qu'il trouvait, vraisemblablement un niveau trois. Lançant son couteau à cran d'arrêt sur elle, il vint de ficher dans une des fentes de la carapace. Lorsqu'il fut près d'elle, et sans hésiter, Blume fit un pas sur le côté, agrippa la carapace et, s'appuyant du pied au couteau qu'il venait de planter, il se hissa sur le dos de la créature, pour lui planter avec force celui qu'il lui restait dans ce qui devait être l'équivalent de sa nuque. Priant pour tenir le plus longtemps possible avant qu'elle ne l'éjecte, il continua de lacérer méthodiquement les bouts de chair disponibles de la bestiole. Autant vous dire qu'il aurait préféré rester le plus loin possible de ce genre de saletés, mais le combat au corps à corps, ça ne pardonnait pas.

Sortant le couteau le plus long qu'il pouvait trouver de sa ceinture, il réussit à creuser une profonde tranchée derrière la tête de la Tache avant qu'un mouvement de celle-ci ne l'envoie valser. Par miracle, il réussit à se rattraper sans trop de mal, glissant sur le sol de terre. Dans le fracas de l'action il n'avait pas vu si on lui avait porté secours, mais dans tous les cas, la Tache s'effondra. Raffermissant sa prise sur le couteau, il se détourna vers les quatorze autres qui l'attendaient.